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ULTRA TRAIL DU VERCORS 2014 Récit de Mick, Nono et Max

Publié le 29 Octobre 2014

ULTRA TRAIL DU VERCORS 2014

Récit de Mick, Nono et Max

VENDREDI 5 SEPTEMBRE 2014

Veille du départ, ça fait maintenant 7 mois que nous nous sommes inscrits à l’Ultra Trail du Vercors, notre premier ultra à tous les trois. On s'est préparé en participant au Marathon du Connemara, au Trail d'Hautacam (22 km 1600 D+ dans les Pyrénées), ainsi qu'aux 25 bosses près de Rambouillet (Ile de France). L’objectif est clair : prendre le départ ensemble (ça c’est facile) et arriver ensemble (ça c’est difficile). Nous avions réussi le mini défi tous les trois l’an dernier au Menestrail (non sans mal pour certains sur 33 kms…), on peut le refaire !

Mick : Pour une fois, côté blessure, rien de méchant n'est à signaler pendant la prépa. C’est bien la première fois avec mes problèmes de genoux. J'espère juste qu'ils tiendront pendant toute la course.

Max : Personnellement, ma plus longue distance restait le Menestrail 2012 avec ses 53kms. Nous passons à presque 90 km avec 5000 mètres de dénivelé, le défi est tout autre, à la fois excitant et flippant.

Nono : Avec peu d’expérience sur les longues distances et une préparation bien rythmée mais trop axée sur les courtes distances (contraintes « d’expat » disais-je pour me rassurer), j’étais clairement dans l’inconnu sur mes capacités physiques. Une chose était sûr en revanche, j’étais remonté à bloque, je voulais tester mes limites et en découdre avec la montagne. Et puis quoi de mieux que de le faire en aussi bonne compagnie et en présence de supportrices.

Après nous être installés dans un camping de Villars de Lans et après un plouf dans la piscine, nous nous sommes rendus à Méaudre (lieu de départ) pour retirer nos dossards et assister au briefing de course. Premier ultra, premier briefing. Que d'excitation! On nous annonce un parcours magnifique, avec plein de péripéties: le scialet, les sommets du Moucherolle... Plus le temps passe et plus la pression monte. Malgré tout, l'ambiance et la sympathie des bénévoles nous rassurent. La journée de demain s’annonce inoubliable.

Pour nous aider dans notre périple, deux supportrices infatigables : Maïwenn et Marie. Malheureusement Anaïs ne sera pas présente pour Norbert, mais, par la pensée, on peut faire de grandes choses ! Suivre trois coureurs dans la montagne s'avère compliqué mais le plan qu'elles établissent ce vendredi soir, autour d’un gigantesque plat de pâtes, paraît infaillible : à nous de respecter les horaires de passage...

Max : Finalement, nous avions légèrement surestimé nos capacités, ça avait l'air bien pourtant de finir en 15 heures...

SAMEDI 6 SEPTEMBRE 2014

KM1 – KM24 : MEAUDRE - CORRENCON : 24KM / 940m D+

Il ne fait pas chaud sur la ligne de départ, nous ajustons une dernière fois le matériel, c'est important de ne rien laisser au hasard sur ce genre de course, la moindre boulette sur le matériel peut contraindre à l'abandon. ET C’EST PARTI !

Beaucoup de tension au départ, il s’agit de ne pas glisser sur une racine au bout de 500 mètres... Départ splendide entre les flambeaux sur un single assez roulant pendant plusieurs kilomètres.

Mick : Le départ est donné, Maïwenn est déjà là pour nous encourager. Ça fait chaud au cœur! Le départ à la frontale est magique.

Nono : Putain, c’est parti. Mais dans quoi s’est on lancé, il est 5h du mat’ et on en train courir en plein milieu des montagnes sans même apercevoir nos pieds. Norbert, ne te prends pas une racine dès le début, reste derrière Mick et son phare qui lui sert de frontal.

Le maître mot de ce début de course : courir en dessous de notre rythme de croisière et arriver à Corrençon comme si la course n’avait pas débuté. On s'efforce de courir lentement et, on papote là où les pentes deviennent plus raides, rythme plutôt tranquille !

Mick : Les sensations sont bonnes dans cette première partie du parcours. Un autre moment magique : l’aube qui se lève dans la brume sur un plateau.

Max : Je me retrouve régulièrement quelques mètres derrière les gars jusqu’à Corrençon, je cherche à réduire l’allure au maximum. Dans les côtes, on en profite pour parler de la Diagonale des Fous, de l’UTMB…on va vite être calmés !

Nono : Le lever du soleil fut magique, on prend pleinement conscience de paysages qui nous entourent et on commence à savourer, voir à s’enflammer en faisant des plans sur la comète alors que nous n’avons pas encore parcouru 20km…

Le jour se lève petit à petit, plus besoin de la frontale. Les paysages sont magnifiques, nous traversons un village dévasté par la guerre 39-45 où il ne reste que des ruines et une chapelle. Derrière, le soleil se lève sur la montagne, c'est très très beau. On arrive enfin sur le scialet de Malaterre. Nous le traversons sur un pont métallique suspendu. Interdiction de traverser à plus de 10 en même temps sur le pont, comme demandé lors du briefing. Ce type d'endroit fait prendre conscience des dangers du ski hors-piste : l'hiver, la neige cache le gouffre, c'est la chute assurée !

Max : Sans le savoir, je commets ma première erreur, j’éteins mal la frontale et je la range dans le sac...La suite de la boulette dans quelques heures…

La dernière descente vers Corrençon est très technique, "un cimetière à cheville", avec du single très étroit, rempli de cailloux et de pierres. Nous sommes encore frais et concentrés, mais attention au premier faux pas !

Nono : Non mais c’est quoi cette descente. Peu importe où je mets le pied, je tombe dans un trou ou sur une racine.

Puis, nous rejoignons Corrençon après 24 km, et 3h26m de course (281ème/380). Nous sommes toujours tous les trois, motivés et plutôt en forme ! Et…les filles nous attendent au ravitaillement ! Marie et Maïwenn sont là depuis 7h30, déjà une heure de retard sur notre plan de route, nous avons craqué la veille à priori !

Mick : Les filles sont aussi motivées que nous. Que demander de plus avant d'attaquer les Moucheroles!

Max : Il fait froid et la journée marathon des filles ne fait que commencer...Ces moments me rappellent le triathlon de l’Alpe d’huez l’an dernier, leur réconfort fait un bien fou, c’est ce qui nous fait avancer dans les côtes ! Ce n’est que le début...

Nono : On arrive très frais au premier ravitaillement et la température est idéale. Les filles sont déjà là, la première heure du reste de leur journée a commencé….

Nous prenons juste le temps de remplir les poches d'eau, d'échanger sur nos sensations et nous repartons.

KM 24 - KM 41 : CORRENCON - VILLARD DE LANS (COTE 2000) : 17KM / 1230m D+

En partant de Corrençon, nous longeons un golf, ça nous donne des idées mais nous ne sommes pas là pour taper dans la baballe. Nous revenons vite à nos moutons, après un chemin forestier qui nous amène à 1400m d'altitude, nous attaquons l'ascension vers la tête des chaudières, plus de 700 mètres de dénivelé en 5 kms.

Nous débutons en longeant une rivière dans la forêt, puis un sentier en pleine prairie. La dernière portion d'ascension est la plus raide : plus de chemin, seulement des pierres et des rochers… Là encore il ne faut pas se griller, on monte assez lentement et beaucoup de traileurs nous doublent dans la montée. C’est loin d’être une autoroute mais le paysage est vraiment splendide, nous sommes assez lucides pour en profiter en grimpant. L’arrivée au sommet est magique, nous sommes sur la crête, les deux versants de la montagne sont splendides, c’est le moment de prendre des photos


Mick : Nous sommes tous les trois absorbés par les paysages que nous découvrons au fur de notre ascension. Liberté quand tu nous tiens!! Les jambes commencent quand même à vraiment chauffer.

Max : Les jambes répondent très bien, par contre, je commence à être pris de maux de tête (pour une fois que le ventre me laisse tranquille), sans doute l’altitude car tout s’est arrangé dans la descente.

Nono : Je sens que la montée tire un peu derrière les jambes mais mon esprit est occupé à admirer les paysages époustouflants.


Nous arrivons enfin jusqu'à notre premier objectif: 2060m d'altitude. Le sommet de la course.

Première mauvaise nouvelle de la journée: Norbert sent que son ongle de pied, meurtri depuis des mois, ne tiendra pas le choc... Mais un coup de strap, quelques photos de ce paysage magnifique et nous sommes repartis dans une courte descente très technique avant d’enchaîner le deuxième sommet de la tête des chaudières.

Nono : A force de ne plus regarder mes pieds, je donne un coup de pied à un caillou et comme souvent, c’est le caillou qui gagne : un ongle en moins.

Et voilà arriver la deuxième descente ! Elle commence par une piste de ski remplie de cailloux. C'est vraiment une sensation grisante, entre course et glissade dans les pierres : la seule façon de tourner et de s’arrêter, c’est le dérapage.

Mick : Ça change de descendre les pistes en été! L'avantage c’est que l'on peut quand même gérer facilement notre vitesse même s’il y a quelques loupés!

Max : Une leçon de descente n'aurait pas été de trop, on a beau eu regardé Kilian Jornet descendre le Kilimandjaro, l'imiter est un exercice périlleux et trop aléatoire à mon goût ! Mais c’est sympa quand même, les jambes sont relâchées et les efforts de la montée sont quasiment digérés.

Nono : Quelle descente ! J’adore. C’est comme au ski, je ne sais pas maitriser pas ma vitesse mais je prends mon pied. Enfin, façon de parler car je sens que lui ne le prend pas…

Nous sortons des pistes pour atteindre un chemin de forêt très glissant puis un magnifique sentier plus roulant et, enfin, nous arrivons à Côte 2000 (41 km) en 7h09m (269ème/371).

Les filles nous attendent, nous avons toujours une heure de retard sur nos temps de passage estimé mais nous sommes largement dans les temps de la barrière horaire, nous en profitons donc pour prendre notre temps une nouvelle fois. Un petit stop pour Norbert chez le podologue de la course qui lui fait un travail remarquable sur son ongle de pied.

Mick : Nous décidons de prendre un peu de temps sur ce ravitaillement pour profiter de l'animation des bénévoles, faire le plein d'eau et surtout profiter des encouragements. En tout cas pour le moment, rien à signaler au niveau physique. Tout va pour le mieux.

Max : Il fait chaud déjà (midi), la crème solaire s'impose, le plein d'eau également évidemment, je ne veux surtout pas revivre l’insolation de l’an dernier, ça pourrait être fatal à ce stade de la course.

Nono : Le ravitaillement était le bienvenu. Je suis directement allé voir mes futurs meilleurs amis : les podologues. Ils ont fait des miracles avec mes pieds et je suis reparti tout neuf…enfin, au niveau des pieds quoi. Le temps lui était génial et les filles toujours à fond derrière nous.

KM 41 - KM 68 VILLARD DE LANS – SAINT NIZIER : 28.5KM / 1670m D+

La première partie de cette section nous emmène à Lans en Vercors, les organisateurs nous avaient promis une partie plus roulante pour refaire notre moyenne horaire. Alors effectivement, nous ne montons pas à 2000m d’altitude mais nous mettrons un petit bémol sur la notion de « roulante », il y a quand même de beaux "faux plats". Malheureusement un souci de remplissage de poche d'eau va nous obliger à faire cette portion avec seulement deux poches d'eau pour trois. Il est 13h, et le soleil et la chaleur sont au zénith. Cela va nous obliger à puiser dans nos réserves plus tôt que prévu. Mais l'essentiel est de rester soudés et de perdre de vue l’objectif : finir tous les trois. Donc on s'accroche et on grimpe !

Max : Je tiens à signaler que :

  • Nono va en entendre parler pendant environ 27 ans
  • Mick et moi avons un droit d’apéro à vie chez Anaïs et Nono, sans prévenir bien sûr.

Nono : Quel con !!! Le gars du ravitaillement me dit que ma poche est pleine alors que j’ai l’impression qu’il a mis deux gouttes… Pourquoi n’ai je pas vérifié ?!

Merci les gars, vous m’avez sauvé sur ce coup là. Sans ça, j’aurais été obligé d’entrer par effraction dans la première maison qui se présentait …

Une très bonne surprise nous attend sur un sommet au niveau du 50ème km : les filles ont réussi à crapahuter jusqu’en haut du collet du Furon à environ 1500m d’altitude, les encouragements reprennent de plus belle, elles ont galéré à monter jusque-là, quel courage ! C'est un très bon moment de la course dans les alpages. Nous en profitons pleinement.

Max : A noter ce bénévole qui fanfaronne : «Ça descend 500m après la cabane ». 2kms plus tard, nous attendions toujours la descente... Je l’ai un peu maudit quand même, d’ailleurs, je me sens beaucoup moins bien, besoin d’eau fraîche, d’une orange bien sucrée. Bref, je sais que le soleil a commencé son effet sur moi, les kilomètres à venir risquent d’être désagréables…

Nous rattrapons pas mal de monde dans la descente vers Lans en Vercors et 500m avant le ravitaillement : une fontaine... le bonheur! Et enfin, ce ravitaillement où nous arrivons en 10h13m. (236éme/330). Marie et Maïwenn nous attendent déjà après leur descente fulgurante des alpages! Leur journée est un marathon, elles n’arrêtent pas, il fait chaud et pourtant, au lieu de profiter de la piscine du camping, elles sont là…pour notre plus grand bonheur.

Mick : Merci les filles d'avoir descendu la montagne à toute allure pour moi!!! Vous êtes au top! Nous prenons le temps de faire remonter le sang de nos jambes, elles deviennent lourdes et ils restent une trentaine de kms.

Max : J’ai besoin de récupérer, m’allonger, me rafraîchir, là ça devient dur, le coup de chaud ne fait que commencer.

Nono : Les jambes commencent à devenir lourde, ça fait plus de 10h que nous courons. On sait tous les 3 qu’on est arrivé à un point crucial de la course, c’est dans les 20km qui suivent que tout va se jouer et l’ascension du « mur », en plein cagnard et sans un brin d’air.

Les filles nous annoncent ce qui nous attend : une ascension, ou plutôt un mur d’escalade (Il y a même l'école d'escalade au pied de l'ascension) en plein soleil pour prendre 800m de dénivelé en 7 kms. C’est parti pour la section la plus dure du parcours. On aperçoit les traileurs tout en haut…à flanc de falaise. La course commence ici.

Nous commençons par le fameux mur : c’est de la grimpette avec les mains, les cordes... La roche, le soleil et surtout, aucun brin de vent. C’est la partie la plus dangereuse du parcours, malgré la présence des bénévoles, il ne faut pas se louper. Nous passons plutôt bien cette portion, pas mal de participants sont allongés dans les rares coins d’ombre, nous en profitons pour faire quelques pauses également, ça tape dur. Malgré la difficulté, nous profitons de cette magnifique ascension qui nous mène vers un sentier moins pentu mais beaucoup plus long, dans lequel les organismes vont être mis à rude épreuve, principalement à cause de la chaleur : 2 km d’ascension en plein soleil sur un chemin caillouteux très large avec énormément de luminosité.

Mick : Maxime s'en souviendra. Une petite insolation lui fera perdre tout son jus. Nous resterons malgré tout groupés le plus longtemps possible. Mais Max nous force à partir devant. Il se connaît très bien et il sait qu'il est capable de nous rattraper une fois que le coup de mou sera passé. Nous continuons donc sur un bon rythme avec Norbert, et arrivons enfin au sommet duquel nous pouvons admirer une superbe vue sur Grenoble.
Max : Le soleil a eu (encore) raison de moi : envie de vomir, vertiges… Impossible d’avancer et de suivre les gars, je leur demande de ne pas m’attendre, ça va être très long et je risque de les mettre hors délai. Les idées négatives commencent à m’envahir l’esprit, je pense sérieusement à abandonner. Il restera 30 kms après ce sommet et je n’ai plus de force, heureusement, je ne suis pas seul, nous sommes plusieurs dans la même galère mais impossible d’accrocher un groupe pour le suivre. J’ai même une hallucination : je crois voir Marie et Maïwenn au loin, pas de chance, c’était deux ados de 13 ans environ… Après plusieurs pauses à l’ombre et des débuts de crampes, j’atteins le sommet (km6
4).

Nono : Que c’est dur de devoir laisser Max derrière…surtout dans cet état mais il nous a contraint à le faire et il a eu raison. Il se connait bien, il a plus d’expérience et surtout il a l’art d’avoir des ressources quand on ne s’y attend pas.

Le sommet est splendide : une magnifique vue sur Grenoble d’un côté du versant et sur la vallée de Lans en Vercors de l’autre côté.

Mick : Étant toujours sans nouvelles de Maxime et voyant la barrière horaire se rapprocher, Nono et moi décidons de commencer la descente vers Saint-Nizier. Le début se fait par "le coup de Grace" comme l'appellent les gens du coin. Et effectivement, c'est vraiment un début de descente très technique et très glissant. Plusieurs chutes sont à noter pour ma part. Sans mal, heureusement. Nous parvenons quand même à rattraper quelques concurrents dans cette portion. Enfin, le chemin se fait plus clément ! Très pentu par endroit, mais quand même plus large. On continue à reprendre des places jusqu’à Saint Nizier. 5 minutes après notre arrivée, qui voit-on débarquer en trombe au ravitaillement???

Max : Un peu d’air au sommet me fait beaucoup de bien, je réussis à courir un peu sur la crête, les sensations reviennent petit à petit. Ces sensations ne me lâcheront plus jusqu'à la fin ! A partir de ce moment, je prends un plaisir fou, j’ai l’impression que c’est le début de course, je rattrape une vingtaine de traileurs dans la descente et sur le plat. J’entends des « ah lui, il fait la course en relai ! » Et non les gars ! Je me demande encore comment c’est possible. En l’espace de dix minutes, je passe d’un abandon quasi certain à un plaisir de courir comme j’en ai rarement connu. Je me lâche, j’ai envie de courir vite, même quand ça monte, je veux accélérer, j’ai besoin de courir vite, de rattraper les gens, c’est grisant. C’est un miracle !

Nono : La vue du sommet est magnifique mais on en profite peu, à la fois parce qu’on sait que la barrière horaire approche mais aussi car on est sans nouvelle de Max. La descente fut très rapide, Mick donnait le rythme et montrait les erreurs à ne pas commettre… Mes pieds eux, continueront à souffrir avec de nouvelles ampoules (6 au total) mais bon ce sera vite sera vite oublié grâce à mes amis podos lors du ravitaillement de Saint-Nizier et surtout par le retour de Max dans la team. On se demande d’ailleurs si c’est toujours le même. On a laissé un Max au bord du malaise pendant l’ascension et on retrouve un mec sous coke au ravito.

Tellement contents de nous revoir, c’est l’euphorie à Saint Nizier où nous arrivons en 13h22m (204ème/277). C'était vraiment un grand moment. Mais malheureusement, pas le temps de tergiverser. Nous sommes passés une bonne demi-heure avant la barrière horaire, mais malgré tout, la course n'est pas finie. On recharge donc une nouvelle fois nos poches d’eau et Nono en profite pour retourner chez le podologue. La descente a eu raison de ses ampoules. Nous repartons avec des encouragements très fournis pour la dernière étape.

Mick : Pour moi, physiquement, tout va pour le mieux. Aucun bobo et en plus nous sommes remontés comme des pendules suite à la performance de Max.

Max : Je me souviendrai toujours de ce cri de joie en dévalant la pente lorsque j’ai aperçu le ravitaillement puis Marie (qui commençait à se faire du souci…). Impossible de m’arrêter devant elle, je ne contrôlais plus rien dans cette descente…Quel homme ingrat !

Nono : Le retour de Max nous a dopé. On accélère le rythme, on s’enthousiaste pour tout et on commence à se dire qu’on va la finir… Ce qu’on ne sait pas, c’est qu’il reste encore des heures de course derrière nous.

KM 68 - KM 92 SAINT NIZIER – MEAUDRE: 22.5 KM / 1350m D+

Maintenant, direction Autrans. Nous commençons par la descente vers Engins dans un chemin forestier avec une belle descente qui nous avait aussi été annoncée. Puis l’arrivée au pas du curé : on se croirait dans la forêt de Brocéliande, c'est magnifique. Un escalier naturel très raide et glissant d'une bonne centaine de marches. Interdiction de courir dans cet escalier. Une fois en bas, nous traversons un barrage avant d'attaquer la dernière grosse ascension (850mD+). Le début se fait sur route, mais nous rentrons vite dans le vif du sujet. Une côte très raide à travers un sous-bois. Le pourcentage est sévère, régulièrement entre 25 et 35% pendant 4kms laissant très peu de répit. A 2 km du sommet, c’est au tour de Mick de lâcher prise, il a besoin de s’allonger le gaillard.

Mick : La nuit commence à tomber et le froid revient après cette chaude journée. Je sens que je commence à me refroidir. Je décide donc d'accélérer un peu pour me réchauffer. Malheureusement, c'est trop tard. Je sens mon ventre se retourner en arrivant sur un plateau. Il est temps pour moi de m'arrêter 5 minutes pour récupérer, et surtout pour me changer. Remettre des affaires sèches me fait déjà beaucoup de bien. J'ai dit à Norbert et Maxime de continuer sans moi, je ne voulais pas les ralentir. Et je savais que je finirai par réussir à me relancer.

Max : Mick m’a impressionné depuis le début, c’est souvent lui qui donne le rythme quand ça monte, il gère sa course parfaitement en termes de ravitaillement et d’équipement depuis le début. Un métronome. Lui, c’est le coup de froid qui l’a rattrapé. On est monté rapidement en altitude et il est déjà 20h, il fait beaucoup plus frais. Mais je sais qu’il va se relever, il a le plus gros mental de nous trois, jamais il n’abandonnera ! Nono et moi continuons devant, nous avons un bon rythme d’ascension et dépassons beaucoup de monde. Evidemment les pieds sont douloureux mais c'est logique donc rien de méchant. Le pire est derrière moi, c’est certain, je suis euphorique depuis ce fameux sommet…

Un trailer nous demande à quoi on tourne :

- « C’est du Ricard dans ta gourde c’est ça ?? » …

- « Purée ne me parle pas de Ricard maintenant, je vais y penser jusqu’à la fin !!! »

Nono : Dur dur de devoir en laisser un derrière une nouvelle fois, mais j’ai retenu la leçon avec l’épisode de Max. Ces deux là, c’est du costaud. S’ils s’arrêtent, c’est pour mieux repartir. J’ai toujours su qu’ils étaient fort mentalement mais ce qu’ils ont fait m’impressionne.

De notre côté, on repart sur un très bon rythme avec Max, les jambes sont au rendez-vous et on se sent galvanisé en s’apercevant qu’on monte plus vite que les autres coureurs.

Mick : Je repars donc tant bien que mal dans un nouveau chemin forestier. Je ne sais pas trop où j'en suis de mon ascension. Dans des moments pareils, on perd parfois un peu de lucidité. Le tout est de continuer à monter. De nombreux trailers me dépassent, ça fait mal au moral, mais ça donne quand même des repères pour s'accrocher. Je ne peux toujours rien manger, ni boire à cause de mon ventre. Je sais que ce n'est pas bon, alors j'essaye quand même de boire un peu d'eau.

Cette ascension devient interminable à partir du moment où nous quittons les bois pour traverser un alpage qui continue de grimper entre les vaches et leurs clochettes. Agaçantes ces clochettes d’ailleurs… Il fait vraiment froid et la nuit tombe, il n’a pas fallu plus de trois minutes d’arrêt pour attraper un gros coup de froid, il est temps d’arriver au sommet dans quelques centaines de mètres pour courir un peu. En haut, nous sortons nos frontales pour débuter la descente.

Mick : Je sors finalement de ce bois. Une délivrance de courte durée car je tombe dans un alpage qui n'en fini jamais. Chaque crête que l'on voit paraît être la dernière. Mais non! Pas de chance, il faut continuer. Un troupeau de vaches est même là pour nous encourager. Quoi que... L'une d'elle commence à manger les balises posées par l'organisation la veille. Sur une crête, un peu plus loin, des bénévoles me donnent enfin la vraie distance avant le sommet: 10 minutes... Quoi!?! Encore dix minutes! C'est dur, mais bon, au moins je sais combien de temps je vais devoir serrer les dents. Une fois en haut, je m'assoie un peu pour manger et me réchauffer. Je mets également ma frontale. La nuit est vraiment tombée maintenant.

Max : Mick n’est pas revenu sur nous, il va devoir descendre tout seul. L’attendre, c’est le coup de froid assuré. Pas de chance, à cause de ma bourde du début de course, ma frontale clignote : quasiment plus de batterie, elle s’éteint au milieu de la descente. Et là, merci Steve Jobs ! C’est la lampe torche de l’iPhone qui a pris le relai. Sacrée puissance cette lampe d’iPhone… Au milieu de la descente, je regarde ma montre : 21h15 ! La barrière horaire est à 21h45 et il reste environ 4km. Plus le droit de réfléchir, il faut accélérer si on veut passer. Les jambes répondent du tonnerre, Nono est dans mes baskets également, en revanche, j’ai peur pour Mick, ça va être short pour lui s’il a perdu du temps dans la dernière ascension.

Nono : Quelle fut longue cette montée. J’avais pourtant l’impression qu’on avançait vite. L’arrivée au sommet avec la présence d’un troupeau de vaches perdu dans le pâturage fut très atypique. Par contre la nuit commence à tomber et on s’attaque à la descente avant le dernier ravitaillement. Max carbure, je le suis tant bien que mal. Je ne veux surtout pas tomber, pas maintenant.

Mick : Allez c'est parti pour une descente de folie en pleine nuit! Je fais très attention à tout. Racines, rochers, cailloux… Mais je vais le plus vite possible. Je redouble énormément de concurrents. Beaucoup m'avaient doublé dans la côte. A la sortie de cette descente, j'attaque une portion de route sur laquelle je cours toujours autant que je peux. Je continue à remonter des participants...

Nous apercevons Maïwenn et Marie après un faux plat de 1.5kms, elles nous annoncent 800m avant le ravitaillement et donc la barrière horaire. Il est 21h35, c’est gagné pour cette barrière ! Mais nous ne savons pas où en est Mick…

Max : Marie me suit jusqu’au bout, on court à 13km/h, elle n’a jamais couru aussi vite et personnellement, je ne me suis jamais senti aussi fort aujourd’hui. A l’arrivée au ravitaillement, je me dis que c’est cuit pour Mick, il reste 5 minutes…

Nono : Une fois la descente dévalée, nous attaquons un tronçon de plat goudronné avant le ravitaillement. Je me sens trop bien et je donne tout pour rattraper Max et respecter la barrière horaire. J’aperçois Maiwen, toujours à fond, qui me dit que le ravitaillement est à 800mètres et qu’on est dans les délais. J’accélère encore.

Mick : Surprise, Maïwenn m'attend. Que fait-elle là? Elle me demande si je veux terminer la course. Quelle question! Bien sûr! Elle m'apprend qu'il ne reste que 5 minutes avant la barrière horaire et qu'on est à environ 1km du ravitaillement. On part donc tous les deux en trombe dans Autrans. Plusieurs habitants nous encouragent. On remonte encore quelques concurrents. En arrivant vers le ravitaillement, les bénévoles nous disent que c'est bon, on passe bien sous la barrière horaire, Ouf! Je me dis que beaucoup de participants ne passeront pas, mais heureusement pour eux elle sera prolongée de 15 minutes. Je retrouve enfin mes copains. Je ne peux résister à leur sauter dessus. Que d'émotions pour moi. Ils sont finalement arrivés 3 minutes pour Max et 2 minutes pour Nono avant moi. Je me dis que j'ai dû faire une belle descente quand même.

Nous voilà tous les trois à Autrans (84 km) après 16h40m. (171ème/190). Cette fois, à moins d’une catastrophe, nous savons tous les trois que nous serons finishers de l’UTV 2014 !! Il nous reste 8kms pour rallier Méaudre, une petite ascension de 2.5kms puis une dernière partie roulante. Les filles ont eu peur, elles ne pensaient plus nous voir arriver avant 21h45, elles ont même confondu Mick avec un autre traileur. L’émotion... Un peu d’excitation malgré la fatigue, nous savons que nous avons fait le plus dur. Maintenant, il faut finir le travail.

Max : Le président de l’asso organisatrice me rappelle à l’ordre au moment de repartir à cause de ma frontale HS. Heureusement il a rapidement homologué l’iPhone en tant que frontale de fortune, Ouf!

Nous repartons donc du ravitaillement vers la dernière ascension de la course qui est raide mais très courte. Nous avons toujours les jambes. On se permet le luxe de grimper à bonne allure. Longer des tremplins de saut à ski est une drôle d'expérience pour nous les bretons! Nous enchaînons par un chemin forestier sans grande difficulté. Nous sommes suffisamment frais pour courir à une très bonne allure (vu la distance déjà parcourue). On remonte donc beaucoup de participants sur cette partie du parcours malgré un beau vol plané de Nono qui a buté sur une racine. La nuit est totale. Ça va lui gâcher un peu la fin de course mais ça n'entamera pas du tout son moral. Arrivé là, il en faut plus pour nous décourager.

Nono : Ce qui devait arriver, arriva ... je suis à fond derrière Mick et d’un coup, je me retrouve par terre sans trop comprendre le pourquoi du comment. Je me casse l’ongle de l’autre orteil, il n’y aura pas de jaloux au moins. Je grogne un peu contre moi-même et mon erreur mais je repars sans perdre de temps. On sait qu’on va la finir et surtout qu’on va la finir ensemble.

Nous sortons finalement des bois pour arriver directement à l'entrée du village de Meaudre. Enfin! Il ne nous reste plus qu'à profiter à fond de cette fin de parcours : on l’a fait ! Tous les trois ! Une belle équipe !

Juste avant le dernier virage, nous rejoignons Maïwenn et Marie qui nous attendent de pied ferme. L'émotion est bien là...

Avec l'effort effectué, tout est plus intense. On se congratule. Nous finissons cette magnifique aventure tous les cinq, main dans la main. Que demander de mieux. La fatigue n'a plus sa place à cet instant. C’est magique !

Nous sommes finishers (92 km) après 17h49m52s (156ème/187) d'efforts, mais surtout de plaisir. Nous pouvons être fiers de nous, la course a fait beaucoup de dégâts (187 arrivants sur 400 partants).

Mick : Petite surprise (merci Marie), le speaker va même être le premier à me souhaiter mon anniversaire. Même s'il a un peu d'avance... Il me reste encore 1h10 avant d'avoir 25 ans.

Max : Ce genre de moment est assez dur à décrire, il faut le vivre ! Contrairement à l’Alpe l’an dernier, je profite de notre arrivée tous les cinq, c’est un grand moment.

L’après course est compliquée à gérer. Pas de grosse douleur physique, mais la fatigue et le froid se font sentir. La bière du Vercors est excellente, mais elle va nous refroidir encore plus.

Mick : Je suis congelé, tout mon corps frissonne. La décision est prise de me changer et de mettre des affaires sèches. Quoi? Je suis au milieu de la route à moitié nu? Ce n'est pas grave. Urgence oblige!

Nous poursuivons par un repas bien mérité servi par les bénévoles. Ils sont toujours aussi sympas et aux petits soins pour nous. C'était vraiment très agréable d'être accompagnés par des bénévoles et une organisation aussi fantastique. Ils nous ont vraiment fait vivre une journée exceptionnelle.

Les mots de la fin :

Mick : Merci à mes deux compagnons de galère avec qui on a partagé de supers moments. Des passages plus difficiles, comme la montée après Lans, et d'autres, magiques, comme l'ascension des têtes des chaudières. C'était vraiment énorme les gars. J'ai hâte de retourner à l'attaque! Un grand merci surtout à Maïwenn (et à toi aussi Marie) pour nous avoir suivis et supportés pendant toute cette épreuve et aussi pendant notre préparation. Sans toi, je ne serai pas arrivé si loin. Merci pour tout. Allez, après toutes ces émotions, c'est une petite nuit de sommeil qui nous attend (4h) et on décolle pour des vacances dans les îles grecques avec les copains (juste à 14!). Que demander de mieux pour récupérer...

Max : Je suis vraiment satisfait de la façon dont on a géré la course, sans jamais se mettre dans le rouge pendant 2/3 de la course. Malgré un coup de chaud lors de la montée à Moucherotte qui aurait pu me coûter un abandon, les jambes ont plutôt bien suivi, voire très bien suivi en fin de course. C'est une expérience inoubliable, vécue avec deux coéquipiers qui ne lâchent rien et avec qui la course permet d'allier plaisir, déconnade, dépassement de soi... Et il reste de beaux défis à réaliser ensemble. J'espère que l'on donnera envie à certains de s'y mettre, c'est un beau moment d'amitié que l'on n'oublie pas, ce groupe ne demande qu'à s'étoffer ! Deux mots pour Marie : Désolé (de te donner des sueurs froides lorsque tu ne me vois pas arriver) et Merci (de me pousser à aller au bout en m’encourageant jusque dans le fin fond des alpages du Vercors).

Nono : C’était magique et ça restera une expérience humaine et sportive inoubliable. On peut être fier de nous, on s’est dépassé, on a testé nos limites et on a vécu de grands moments d’amitiés. Une chose est sûre, c’est la première grande course tous les 3 mais ce n’est pas la dernière. Et que dire des filles, elles ont été géniales, encourageantes et surprenantes. Vous n’imaginez pas le réconfort que c’est de vous voir ou de vous savoir (Anais) derrière nous à chaque moment.

Prochain épisode en 2015 !

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